Interview Observatoire Français du PHP du 27-06-2002

Observatoire Français du PHP - OFPHP

O’Reilly : Xavier Cazin

[Parcours, actions]

O’Reilly a été fondé formellement il y a 25 ans. À l’origine il s’agissait d’une petite boîte de consulting qui écrivait de la documentation à la demande pour ses clients. Un jour est venue l’idée d’écrire de garder les droits pour vendre cette documentation moins cher à plus de monde, autrement dit publier des livres. On est passé du sur-mesure au prêt-à-porter (tout en restant dans la haute-couture :-)Notre environnement informatique était naturellement Unix, le seul qui permettait à l’époque d’écrire des livres en équipe, et de les mettre en page avec un rendu correct, pour un prix avantageux (encore aujourd’hui,certains de nos livres sont écrits en troff 🙂 Cette expérience d’Unix nous a amené à écrire la fameuse série des X Window, à laquelle le MIT, inventeur de X, a donné quelque publicité. Notre réputation auprès des unixiens a crû progressivement, pour atteindre un point d’inflexion en1994, où la sortie de “The Whole Internet”, vendu à plus d’un million d’exemplaires (record jamais égalé depuis), nous a fait changer d’échelle.
Les protocoles de l’Internet étant les mêmes que ceux utilisés par Unix,nous nous sommes alors retrouvés par hasard l’éditeur le plus compétent du marché sur le sujet le plus important du moment ! À partir de là, nous avons tenté de cultiver cette avance, non pas en parlant de sujets inconnus des autres éditeurs, mais en essayant de comprendre mieux que les autres l’importance d’un sujet ou son peu d’intérêt dans un monde relié en réseau.
C’est d’ailleurs pour cela que pendant longtemps nous n’avons pas su dire grand chose sur MS-Windows : nous avions du mal à parler d’un “système d’exploitation” qui ne soit ni multi-tâches, ni multi-utilisateur, ni même destiné à être relié au réseau ! Ce n’est plus vrai depuis deux ou trois ans, mais nous avons parallèlement pris fait et cause pour le logiciel libre, qui nous a semblé, outre l’aspect politique intéressant et moderne,un prolongement naturel de l’esprit Unix : mise en réseau des informations et automatisation des tâches répétitives.
Bref, depuis bientôt 25 ans, nous nous intéressons toujours à la même chose: expliquer à nos lecteurs les différentes manières d’échanger des informations le plus efficacement possible.

[Depuis quand travaillez-vous chez O’Reilly ?]

O’Reilly a commencé entre1995 et 1997 par diffuser en France quelques traductions par l’intermédiaire d’une joint-venture dont je faisais partie. O’Reilly ont ensuite souhaité établir une filiale autonome, et m’ont proposé d’en prendre la direction éditoriale, ce dont je ne suis pas encore lassé !

[Depuis quand le site existe-t-il ?]

www.oreilly.com existe depuis 1993. En1994, le catalogue de ressources Internet que nous proposions en complément du livre “The Whole Internet” était l’équivalent des portails de type Yahoo! aujourd’hui, mais en mille fois plus petit ! Ce catalogue est devenu en 1995 le GNN et a ensuite été vendu à AOL qui n’en n’a pas fait grand chose. Aujourd’hui, puisqu’on ne peut plus décemment proposer un site de ressources, nous proposons un ensembles de sites d’articles à haute valeur ajoutée, fédérés sous la bannière oreillynet.com, et étroitement relié au site oreilly.com, plutôt centré sur notre activité première qui reste le livre.

[Pourquoi Linux après Solaris, pourquoi PHP sous Linux]

En 93, Linux n’existait pas 🙂 Toute notre infrastructure était composée d’Unix propriétaires. Nous avons remplacé Solaris par Linux quand la machine s’est faite vieille et que Linux est devenu mature. Ensuite, le besoin s’est fait sentir d’ajouter quelques fonctionnalités dynamiques. Java nous a semblé un peu lourd pour cela (surtout qu’à l’époque Java tournait moyennement bien sous Linux), et l’administrateur qui nous a proposé le premier une solution utilisait PHP et non CGI. Va donc pour PHP !

[Audience du site]

Environ 2 millions d’adresses IP différentes par mois et, plus intéressant, 8 millions de pages servies. Sur www.oreilly.com uniquement : je ne connais pas les chiffres d’oreilly.net.

[Propriétaire vs PHP]

Grâce à notre expérience du monde Unix, nous savions que les outils libres étaient aussi fiables sinon plus que les outils propriétaires. Et nous savions aussi que notre site était en train de devenir un aspect majeur de notre développement marketing. Il était donc hors de question de se retrouver un jour coincé parce que tel logiciel ne tourne pas sur telle machine, que le code HTML généré n’est pas compatible avec certains clients, que la licence expire, que sais-je. L’avantage des outils propriétaires est de proposer des kits tout faits pour transformer un site en vitrine de Noël. Ce n’était tout bonnement pas notre objectif,et cela correspond à une méconnaissance du web : il est très rare de passer par hasard devant un site web. La technique de la vitrine racoleuse est donc sans objet. A contrario, si vous visitez un site pour y trouver de l’information et que justement votre client web ne comprend pas certaines techniques propriétaires, vous n’y retournerez plus.

Observatoire Français du PHP - OFPHP

[Décision]

La décision de travailler avec des outils libres a été prise progressivement par les cadres dirigeants. Le choix de PHP provient d’un choix technique d’un technicien pour remplir les objectifs qui lui avaient été assignés par les dirigeants. Mais PHP avait alors fait ses preuves pour ce genre d’applications depuis quelque temps. Il est possible qu’une proposition à base de servlets Python aurait rencontré plus de résistance…

[Satisfaction]

Bizarrement, notre Intranet s’est constitué bien après notre site web. Le fait que nous ayons repris les mêmes outils (Linux, Apache,PHP) montre que tout le monde était satisfait.

[Budget]

Je n’en n’ai aucune idée. Mais je crois que le site emploie 3 personnes à plein temps, ce qui montre que tout n’est pas encore automatisé:-) Cela représente 90% du coût puisque le reste tient en une location de ligne vers l’Internet et à deux ou trois PC remplacés en fonction de leur usure et de la puissance nécessaire pour faire face à l’augmentation des visites. Le temps dépensé pour la maintenance technique (hors contenu) se réduit à quelques optimisations ici ou là. Le travail des webmestres consiste principalement de rédiger de nouvelles brèves, effectuer des interviews, et d’hypertextualiser tout ça, autrement dit, ce qui fait vraiment vivre un site.
Tout se fait en interne. Cela est dû à l’importance stratégique de notre image : les webmestres travaillent directement avec les éditeurs et les responsables du design qui vérifient que le site reste cohérent avec nos couvertures et notre matériel publicitaire. Une externalisation avec charte graphique et compagnie risquerait de conduire à une certaine inertie(redéfinition de la charte à chaque changement, d’où nouveau contrat, etc.)Nous avons la chance d’avoir des compétences internes, nous en profitons.

[Incidence du site sur la vente de livres]

Un site informatif qui tourne bien contribue à faire connaître nos nouveautés mais aussi notre fonds. En cela, c’est devenu un outil marketing indispensable. Nos livres sur les techniques du web se vendent bien, mais il est difficile de dire si c’est parce que les lecteurs savent que nous y mettons une bonne partie de notre propre expérience.

[Part des ventes des livres PHP]

Revenons en France : aux Etats-Unis, nous avons mis plus de temps à publier des livres sur PHP. Ici, “Pratique deMySQL et PHP”, de Philippe Rigaux, est de loin notre best-seller. Il ne porte d’ailleurs pas spécifiquement sur PHP, mais explique clairement aux débutants ce qui se passe derrière un serveur web, et comment faire des choses vraiment utiles avec ce langage. Le bouche à oreille fait le reste.Nous espérons traduire deux livres américains l’année prochaine sur le sujet, dont le livre de Rasmus Lerdorf, “Programming PHP”.

[Enthousiasme]

On peut parler d’enthousiasme, mais je ne suis pas sûr qu’il soit dû entièrement à PHP. Je pense que le trio Apache, MySQL, et PHP permet de faire des miracles, quels que soient le niveau initial du webmestre et l’ambition du projet. Ajoutez Linux pour former l’acronyme LAMP, et vous avez de quoi créer sur votre ordinateur portable un site équivalent à la plupart des sites en activité. En ne payant que l’ordinateur.

[ASP vs PHP]

Le nombre d’utilisateurs est à prendre en compte. Pendant très longtemps, ASP s’est retrouvé sur tous les environnements de développement Microsoft, et les entreprises hésitaient à confier leur vitrine à un système libre. Autrement dit, en matière d’instanciation de pages web côté serveur, ASP a été longtemps la technique par défaut, et faisait partie des compétences demandées aux webmestres lors de l’embauche. Beaucoup d’entre eux, pratiquant PHP chez eux, avaient besoin de livres sur ASP pour se former rapidement avant de se présenter à leur futur employeur 🙂 C’est entrain de changer, grâce à la conjoncture économique morose : on demande aux directeurs informatiques de faire des économies ; ils se tournent vers leurs techniciens qui leur proposent des logiciels libres ; contrairement aux années précédentes, un débat s’engage entre les deux pôles de compétences, et les techniciens arrivent le plus souvent à convaincre leur direction informatique que les mêmes objectifs peuvent être atteints avec des logiciels libres, qui coûtent moins cher à l’achat mais encore moins à maintenir.

[Pour ou contre PHP]

La technique d’instanciation de pages web est très efficace à la fois pour concevoir et faire tourner un site. Encapsuler du code écrit dans un langage puissant à l’intérieur d’une structure de page HTML est souvent plus facile à contrôler que l’inverse, notamment pour les programmeurs qui ne sont pas des développeurs professionnels. La puissance supposée d’ASP concerne surtout son intégration avec les applications Windows, ce qui devient vite un problème lorsqu’on croit par exemple pouvoir extraire des données d’une base Access pendant qu’un autre usager la met à jour 🙂 Rien qu’à cette pensée, la plupart des administrateurs poussent des cris d’horreur. Autre inconvénient, ASP ne fonctionne bien qu’avec IIS, disponible uniquement sur les versions “serveur” de Windows et, au moins jusqu’à récemment, peu sûrs. Si à l’inverse on choisit PHP, on se donne le droit de changer de système à tout moment, de changer de base de données, d’utiliser Apache, etc. Bref, si l’on choisit la technique de l’instanciation de modèle pour engendrer ses pages web, je ne vois pas très bien aujourd’hui ce qui pourrait motiver un autre choix que PHP (sauf bien sûr si l’on doit reprendre un site déjà ASPisé).

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Éditions O’Reilly
http://www.oreilly.fr
18 rue Séguier
75006 PARIS Fax : +33 1 40 51 52 31

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